On adore les lacs et les montagnes, mais c’est un peu le même panorama qu’on a à la maison dans les Alpes entre la France et la Suisse. Dans ce voyage, on cherche l’inconnu, donc on a pris la décision de quitter la cordillère des Andes un moment et de longer la côte chilienne jusqu’à hauteur de Santiago. Et voilà pourquoi on ne regrette pas notre choix:
De l’Araucanie jusqu’à Concepción
On nous a parlé de la région Araucanie, de ses volcans et ses lacs, tout comme les villes Pucón et Villarrica. Ce qu’on ne savait pas, c’est que cette région est la terre d’origine d’une grande partie des Mapuche, le peuple indigène du pays. Au bord de la côte, nous nous sommes retrouvés au cœur de cette culture. On a commencé à voir des Ruka (maisons ovales en paille) au bord de la route, des stands de nourriture traditionnelle comme les Sopaipillas et Humitas, et des charrettes tirées par des bœufs mélangés dans le trafic. A Cañete, on a visité le musée Mapuche qui nous a donné tous les détails sur cette culture méconnue jusque-là pour nous. On se sentait un peu hors du temps, comme dans un siècle passé depuis longtemps. C’était totalement inattendu, mais d’autant plus beau.
On n’a quasiment plus croisé de touristes, et les seuls présents n’étaient pas européens. On a traversé des petits villages portuaires, mais pas de grandes villes. Sur la route, nous étions souvent tranquilles à monter et descendre au travers de forêts, uniquement les camions chargés de bois nous ont fait des frayeurs en passant un peu trop près en nous doublant. Pour les nuits, on était souvent proche d’une source d’eau, parfois la mer, parfois un lac ou une rivière. La plus belle d’entre elles était certainement à Lebu, après un léger détour qu’on a fait pour éviter l’autoroute. On est parti tard de la ville, on y est resté un moment pour manger et charger nos batteries (notre énergie à nous comme celle des téléphones et autres appareils électroniques). On ne voulait pas rester sur l’énorme plage qui s’étend en partant de la ville sur quelques kilomètres. Nous nous sommes donc forcés à continuer jusqu’à la prochaine baie, malgré une bonne côte en terre à surmonter. Arrivés en haut, on a vu une petite baie vierge en contre-bas, le soleil était déjà couché mais il a laissé un ciel tout rose, ce qui a apporté le petit plus à la magie de l’instant. Sous ce ciel rose, on a monté encore un petit chemin menant sur un rocher au-dessus de la baie, d’où on pouvait voir à la fois la grande plage s’étendant jusqu’à Lebu et la petite baie où on allait mettre notre tente. Ce panorama, on ne l’oubliera certainement jamais. Le lendemain on s’est levé tôt pour découvrir les caves cachés dans les rochers. On a même découvert un tunnel menant jusqu’à la plage de Lebu. Tiens, si on avait pris celui-là la veille, on n’aurait pas eu besoin de galérer sur toute la montée…
On a continué dans le même rythme de montées et descentes en forêt, à la descente toujours une belle vue sur la mer et une plage déserte. Après une nuit proche d’Arauco, on a malheureusement dû continuer sur l’autoroute. En effet, il n’y a aucune alternative, toute cette partie de la côte entre Arauco jusqu’à Concepción n’est atteignable que par une autoroute. Finalement c’était presque mieux que sur la route nationale, parce qu’au moins on avait la bande d’arrêt d’urgence pour nous. Sur la nationale, les camions nous passaient parfois à 30 cm près. On a quand-même profité de sortir de l’autoroute à chaque occasion, car ce n’est pas vraiment un environnement sympa en vélo. C’est comme ça qu’on a découvert les cocinerias à Lota, une grande ville côtière au sud de Concepción qui est encerclé par l’autoroute de tous les côtés. En arrivant il était l’heure de manger, mais on en avait marre des habituels empanadas ou sandwichs. On a donc demandé conseil à un gars qui a commencé à nous parler en voyant qu’on était des étrangers. Il nous a amené quelques blocs plus loin dans un parking ouvert où il y avait un petit local à 3 tables dans un coin. Notre guide nous a présenté et on a été accueilli comme des amis avec une bise et une accolade. Il y avait une salade en entrée, 4 plats à choix et un jus naturel pour accompagner. On a pris chacun le poisson frit avec une salade de patates et mayonnaise. Tout était délicieux, et surtout tout frais. Et tout cela pour seulement 2500 CLP (un peu moins de 3 euros) chacun. Quand on partait, une nouvelle bise, une nouvelle accolade et une tonne de bons conseils avant d’aller à Concepción.
De Concepción jusqu’à Constitución
A Concepción on avait le bonheur d’être hébergé par les parents de notre hôte à Coyhaique. Ils ont pris la tâche très au sérieux et nous ont fait un tour dans la ville et à Talcahue, la ville portuaire toute proche de Concepción. Ensuite, ils nous ont invité à manger du poisson dans leur restaurant préféré. Sur leurs recommandations, on a également essayé un cocktail à base de jus de fruits de mer et cannelle et des empanadas aux fruits de mer, selon eux les meilleurs de tout le Chili. Le cocktail était spécial, on aime ou on n’aime pas, mais pour les empanadas on était d’accord, elles étaient délicieuses. On était gâtés par leur attention, mille merci!
Après tous ces bons plats, on avait bien de la force pour repartir le lendemain. Et il y en avait besoin, car comme pour entrer dans la ville, il n’y avait qu’une autoroute pour en ressortir. En plus, c’était le premier jour (et heureusement le seul pendant tout notre séjour au bord de la côte) où on a pas vu le soleil. On a enchainé les plages et villages en bord de mer pour reprendre une route de terre qui nous a mené à Coelemu, un peu plus à l’intérieur. C’était les pompiers volontaires qui nous ont accueillis là-bas. On voulait juste un endroit tranquille pour mettre nos matelas parterre, finalement on a eu des lits super confortables et l’accès à la cuisine et à la salle de bain, douche incluse. On avait déjà souvent entendu que des voyageurs à vélo étaient accueillis chez les pompiers, mais on ne s’attendait pas à ce confort!
Le jour suivant, à Cobquecura, on a vu des loups de mer sur un rocher dans la mer, tout proche de la plage. Un peu plus loin on a installé notre tente en face de la Iglesia de Piedra, un énorme rocher sur la plage creusé par l’eau, qui a été considéré comme endroit sacré dans les temps anciens. Encore aujourd’hui, certaines personnes amènent des fleurs et font leur prières. Plus on s’est dirigé vers le nord, plus les vagues sont devenus impressionnantes, et on a aperçu les premiers surfeurs à Curanipe, où on s’est arrêté pour manger. Les villages commençaient à devenir plus touristiques également, mais on était toujours les seuls européens. Le soir on a posé notre tente à la plage de Chanco, où on voyait un groupe d’hommes faire du cheval à la plage pendant qu’on prenait l’apéro.
Le lendemain, en remontant dans le village de Chanco, on comprenait pourquoi les cavaliers de la veille faisaient faire des exercices à leur chevaux: C’était le week-end rodéo dans le village. En passant par l’arène, on entendait la musique, et curieux comme on est, on a demandé ce qui se passe ici. On a payé les 2000 CLP d’entrée, une occasion comme celle-là ne se représentera peut-être pas. On voyait des cavaliers à l’intérieur de l’arène tourner en rond autour d’un veau, mais sans le toucher. On y comprenait rien, donc on demandait à un autre visiteur de nous expliquer les règles. Tout fier de ce sport, il nous disait que les 2 minutes en cheval étaient bien plus fatigant qu’un match de foot. On n’est pas sûr si c’est vrai, et on n’a toujours pas compris le détail des règles. Mais c’était une belle matinée qui nous rapprochait un peu plus de la culture chilienne. Quand la pause de midi a sonné pour les cavaliers et spectateurs, on s’est installé à la cafétéria entre les autres spectateurs. Le menu du jour: une bonne tranche de viande de bœuf avec du jus et des papas mayo (salade de patates avec mayonnaise). Revigoré, on a continué notre chemin jusqu’à Constitución.
De Constitución jusqu’à la région de Valparaíso
Constitución n’est pas très grand, nous nous sommes donc contentés d’une matinée de visite de la côte. Nous avons été subjugués par les formations rocheuses, surtout par la Iglesia de Piedra toute blanche. Jusqu’à ce que nous avons appris que la couleur blanche vient des excréments d’oiseaux qui survolent ces rochers toute la journée, on a préféré continuer notre chemin que de l’approcher plus près. Dans l’après-midi, nous avons continué en direction du nord en passant par des dunes et des lagunes qui nous séparaient de la plage. En fin de journée, nous sommes tombés sur un petit camping gratuit au bord de la plage La Trinchera. Il y avait quelques cabanes toutes neuves qui étaient malheureusement toutes occupés. On a inspecté les lieux avant de demander le concierge si on pouvait mettre la tente quelque part dans les environs et utiliser les salles de bain. En réponse, il nous montrait une des cabanes qui allait être libéré dans la soirée, il suffisait d’attendre que les gens partaient. On a donc attendu et discuté avec les chiliens qui étaient en train de ranger leurs affaires. Au final, ils nous ont laissé les restes de leur repas: plusieurs morceaux de Cordero asado (agneaux grillé longtemps sur le barbecue), des patates et de la braise pour réchauffer la viande et cuire les patates. Quel festin, ce cordero, on a tout dévoré et laissé uniquement les os aux chiens errants!
Le matin on avait du mal à quitter cette belle cabane, vieille de 2 semaines seulement. On a inventé pleins de prétextes pour rester plus longtemps: réparation et nettoyage des vélos, nettoyage de la tente, repas du midi… l’après-midi on avait plus rien à faire, donc on s’est remis dans nos selles. On a avancé tranquillement au bord de la plage jusqu’à Iloca, où on s’est installé sur une terrasse au bord de la plage pour un jus de fruit frais et une glace. C’était définitivement une belle journée pour profiter de la vie, sans se hâter. Seulement en repartant, on s’est retrouvé en face d’une côte énorme en chemin de terre très sablonneux. Après quelques kilomètres de galères et une descente toute aussi raide que la montée, on s’est retrouvé en face du Lago Vichuquén. Au bord du lac il y avait que des grandes villas et des retraités. Sur la plage publique de Paula, un petit village, on a posé notre tente entre les roseaux. On espérait pouvoir se cacher un peu, mais les mamies qui prenaient leur apéro et leur bain de minuit à la plage nous ont surement repéré. Heureusement qu’elles n’ont rien dit et qu’elles nous ont laissé dormir tranquillement.
Après une dure matinée à monter et descendre sur des pistes en cailloux, on a fait notre pause pique-nique à Boyeruca. En repartant, on est passé devant les salines de Lo Valdivia. On s’est arrêté un moment pour observer les travailleurs, les bassins pleins de sel aux stades différents et les montagnes de sel en train de sécher au bord de la route. On a rejoint la mer une nouvelle fois à Bucalemu, on a profité de faire une petite pause café dans une boulangerie. Les propriétaires avaient l’air d’être partis en vacances, car c’était que des jeunes qui gardaient la boutique. Matthieu commençait à discuter avec les jeunes et pendant qu’ils servaient d’autres clients, ils nous laissaient même la commande de la télé. Au final on restait plus qu’une heure, et en partant, la serveuse nous amenait un sachet de pain frais pour la route et le boulanger nous donnait des Cocadas (délicieuses boulettes de chocolat et coco) pour le dessert du soir. Vive la hospitalité chilienne!
De retour sur la route, le ciel s’est couvert d’un coup et en arrivant un peu plus en hauteur, on sentait des gouttes de pluie glaciale sur les joues. Cette pluie venait plutôt du côté, entre les arbres, avec des rafales de vent assez fortes. 5 minutes plus tard, tout était terminé et le ciel s’est rouvert. C’était un mauvais rêve? En tout cas, tout s’est transformé en un bon rêve, quand les nuages ont dégagé une belle vue sur la descente devant nous et la mer en contre-bas sur notre gauche. En bas, on est arrivé à Cahuil, où une grande plage nous attendait. On a pris l’apéro au bord de l’eau avant de s’installer dans un petit resto du village pour essayer le Pastel de Jaiba, une sorte de ragoût de fruits de mer recouvert de fromage fondue. On n’imaginait pas bien ensemble les fruits de mer et le fromage fondue, mais c’était un pur délice!
Après une autre nuit tranquille à la plage, on est arrivé à Pichilemu, la capitale mondial du surf (à ce qu’il paraît, en tout cas il y avait un panneau revendiquant cela). On a mangé du poisson frit dans une petite Cocinería avant d’observer les surfeurs à la plage. Mais il y en avait que 2-3 dans les vagues, et ils ne restaient pas très longtemps. Peut-être ce n’étaient pas le bon moment de la journée? En tout cas on n’avait pas le temps d’attendre, on avait encore de la route et un petit col à faire. On arrivait plus à l’intérieur du pays et on découvraient des énormes canyons des deux côtés de la route (un petit avant-goût aux parcs nationaux des USA). Après une belle descente jusqu’à Rapel de Navidad (oui, ça nous a rappelé Noël et oui, on a fait des blagues pas drôles…), on s’est installé au bord du Rio Rapel.
Le matin on a osé se baigner dans la rivière, malgré les énormes poissons qu’on voyait s’approcher de nous à moins d’un mètre. Dommage qu’on n’avait pas de canne à pêche dans nos bagages, ça aurait donné un bon repas de midi. A la place, on a dû se contenter d’un petit pique-nique au bord de la route, perdu dans nulle part. Dans l’après-midi, on est arrivé à San Antonio, le plus grand port du Chili. Cette ville ne nous plaisait pas de tout, heureusement qu’on n’avait qu’à la traverser. Heureusement les villages d’après étaient plus jolis et plus tranquilles, on a pu installer notre tente sur un bout de sable caché entre des rochers à El Tabo, pour profiter d’un dernier coucher de soleil au bord de la mer (et c’étaient probablement le plus beau du voyage jusque-là). Le lendemain, on voulait arriver à Valparaíso!
Valparaíso et ses alentours
Dans un petit village juste avant Valparaíso, on voulait se reposer un peu avant de prendre l’autoroute qui y mène. On cherchait encore l’endroit idéal, quand un homme nous aborde en nous demandant si on était les cyclistes français qui l’avaient contacté sur Couchsurfing. On a répondu que non, nous avions aussi un Couchsurfing mais à Valparaíso. On s’installait donc sur la place principale pour siroter nos jus, tout en discutant d’où habitait exactement notre hôte Couchsurfing. C’est en vérifiant de nouveau le profil plus en détail, qu’on a remarqué que l’hôte avait indiqué Valparaíso sur son profil, mais il avait marqué plus bas qu’il habitait à Placilla, à 15 km de Valparaíso. « Zut alors, 15 km ça fait loin pour visiter… C’est où? » En fait c’était le village dans lequel on était… Mais l’homme qui nous a abordé plus tôt ne correspondait pas du tout à la photo, ça ne pouvait pas être lui, mais la coïncidence qu’il attendait aussi un couple de cyclistes français était juste improbable. En arrivant plus tard dans la maison de notre hôte, on constatait que c’était bel et bien notre hôte: sur Couchsurfing c’était la photo du fils, mais il habitait chez ses parents, donc nous avions déjà fait la connaissance du père! Ils nous ont bien charrié au début, mais ils nous ont quand-même super bien accueillis, de sorte qu’on est même resté plus longtemps que prévu. Depuis un petit moment déjà nous n’avions plus fait de jour de repos, donc nous avons dormi très longtemps, nous avons observé les nombreux animaux de compagnie de la famille (un chien, un chat et même un couple de paons) et nous avons fait une ballade jusqu’au Tranque de la Luz, un petit lac en forêt tout proche du village.
Après le repos bien mérité, on s’est enfin lancé à la découverte de Valparaíso. La ville est construite sur les flancs des montagnes au bord de la mer, donc pour éviter les pentes super raides et les escaliers par endroits, on a décidé de faire la visite plutôt à pied. On a déambulé sur les Cerros (les montagnes de la ville) couvertes de maisons jusqu’aux sommets, pour découvrir les peintures murales colorées à chaque coin de rue et pour profiter des différentes vue sur la ville et la mer. On est passé par la place principale avec le magnifique bâtiment de l’Armada de Chile pour terminer notre visite dans le port. On a reposé un peu nos jambes, plus habituées à marcher si loin, avant de retourner à la maison. Le deuxième jour, nous avons visité le centre culturel de Valparaiso, situé dans les murs d’une ancienne prison. On y a mangé des bonnes tortillas à midi avant d’enfourcher nos vélos en direction de Viña del Mar, une ville balnéaire un peu plus au nord de Valparaíso. Déjà de loin on voyait les grands hôtels au bord de la mer, les parasols et les serviettes qui ne laissaient plus un seul centimètre carré de libre sur la plage. Ce n’est pas du tout ce qu’on aime, donc on ne s’y est attardé que quelques minutes avant de reprendre la route plus à l’intérieur du pays. En traversant la ville, on est tombé sur le musée d’arts décoratifs dans un petit palais. Il était gratuit, donc on a fait une visite rapide avant de s’offrir des tranches de gâteaux délicieux au café du musée. Cela nous a un peu réconcilié avec Viña del Mar, avant de quitter la côte en direction de la capitale, Santiago de Chile.
Ce qu’on a aimé:
- Apprendre à connaître la vie des indigènes, les Mapuche
- L’authenticité et le peu des touristes européens
- Les apéros et les nuits à la plage
- Le soleil qui nous accompagnait tous les jours
- La ville toute colorée de Valparaíso
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